Comment préparer un débat
Un débat est une argumentation structurée par laquelle deux discours opposés essaient de convaincre l'auditoire. Votre but en tant qu'orateur est de convaincre l'auditoire que vous avez raison. Puisqu'un débat est une activité durant laquelle deux co-équipiers affrontent deux adversaires, il faut que chaque couple d'orateurs prépare le débat ensemble.
Les remarques qui suivent veulent présenter un aperçu des démarches que vous devez prendre pour préparer un débat parlementaire. À mesure que vous prendrez de l'expérience, vous aurez accès à des renseignements plus détaillés.
Contenu :
- Choisissez un sujet d'intérêt mutuel.
- Décidez lequel des deux sera le premier orateur.
Le camp affirmatif ( l'équipe qui appuie la proposition)
L'orateur le plus dynamique et convaincant devrait normalement parler le premier .Le camp négatif ( l'équipe qui réfute la proposition)
L'orateur le plus dynamique et convaincant devrait normalement parler le dernier .
- Commencez la recherche sur le sujet. Il faut absolument que chaque coéquipier fasse sa recherche et que tous deux partagent leurs données afin de renforcer leur argumentation. C'est navrant de perdre un débat parce que votre partenaire ne sait pas la réponse à une question préjudiciable soulevée par l'adversaire, quand vous la saviez!
- Prenez des notes au fur et à mesure que vous faites votre recherche sur le sujet.
Assurez-vous de prendre les références exactes sur l'information recueillie:
- le nom de l'auteur et son expertise;
- le titre de l'article;
- le nom du journal, de la revue ou du livre d'où vous avez tiré l'information;
- la date exacte de la publication.
Inscrivez vos notes sur feuilles ou sur fiches et classez-les en précisant le contenu de chacune.
- Partagez les faits et les arguments recueillis avec votre partenaire, une fois la recherche terminée. Classez vos arguments selon leur force. À moins que vos arguments soient liés de sorte que vous deviez présenter un argument de base en premier, vous devriez garder l'argument le plus fort pour finir. Autrement, divisez vos arguments également selon leur force. Souvenez-vous que le premier orateur affirmatif doit définir les termes et a moins de temps ( ordinairement de trois à cinq minutes) pour son discours d'ouverture, alors gardez plus d'arguments pour le deuxième orateur.
- Développez votre discours selon un des plans suivants :
PREMIER ORATEUR AFFIRMATIF (le Premier ministre)
- Présentez la proposition
- Énoncez-la clairement : « La proposition devant la Chambre est...».
- Définissez les termes qui pourraient ne pas être clairs et paraphrasez le tout.
- Faites un bref historique de la proposition (une ou deux phrases).
- Énoncez la position du camp affirmatif : « Nous, du Gouvernement, croyons fermement que... »
- Résumez les arguments du camp affirmatif : « Nous prouverons cette affirmation en développant les arguments suivants: je parlerai de A...,et B...; mon collègue prouvera C..., D... et E... »
- Élaborez le premier ou les deux premiers arguments en présentant des exemples, des faits, des statistiques, des témoignages ou des citations d'experts à l'appui :
« Je vais d'abord démontrer que... »
- Résumez votre argumentation et répétez la proposition.
PREMIER ORATEUR NÉGATIF (le Membre de l'opposition)
- Présentez la position du camp négatif en répétant la proposition selon votre point de vue: " Nous, de l'Opposition, nous opposons tout à fait à la motion telle que proposée par le Gouvernement. Nous croyons que..."
- Acceptez ou rejetez les définitions du Gouvernement. (Si vous rejetez les définitions, vous devez donner les vôtres et les raisons ou les preuves qui les appuient. Dans certains styles de débat, le Président jugera quelle définition sera acceptée; dans d'autres, les juges décident à la fin du débat quelle définition est préférable selon les arguments. Dans le dernier cas, les orateurs qui contestent les définitions à la légère sont désavantagés, parce qu'il se peut que leurs remarques ne soient pas pertinentes.)
- Réfutez le cas du Gouvernement.
- Soulevez les arguments erronés du Gouvernement en citant exactement, si possible, les mots de votre adversaire. (C'est donc important de prendre attentivement vos notes durant son discours)
- Expliquez pourquoi l'argument est erroné en apportant des preuves et des faits à l'appui.
- Répétez la proposition selon votre point de vue si nécessaire.
- Résumez les arguments que votre équipe présentera en précisant ceux que vous développerez et ceux qu'élaborera votre partenaire.
- Prouvez les premiers arguments par des preuves, statistiques, témoignages, etc...
- Résumez la position du camp négatif et répétez la proposition en insistant sur sa réfutation.
DEUXIÈME ORATEUR AFFIRMATIF (le Membre du gouvernement)
- Répétez la proposition, si nécessaire.
- Si on a contesté les définitions, expliquez davantage pourquoi les définitions du Gouvernement devraient être acceptées.
- Réfutez l'argumentation de l'Opposition et reconstruisez celle du Gouvernement
- Identifiez les arguments erronés de l'Opposition.
- Expliquez pourquoi les arguments sont erronés avec preuves et faits à l'appui.
- Résumez les arguments du Premier ministre, en défendant ceux qui ont été contestés .
- Établissez la preuve de vos derniers arguments (les plus forts).
- Faites la synthèse de votre argumentation et réaffirmez la proposition.
DEUXIÈME ORATEUR NÉGATIF (le Chef de l'opposition)
- Répétez la proposition.
- Si vous contestez encore les définitions, présentez des raisons supplémentaires pour prouver que vos définitions devraient être acceptées.
- Réfutez la position du Gouvernement et reconstruisez celle de l'Opposition.
- Identifiez les arguments erronés du Gouvernement.
- Expliquez pourquoi l'argument est erroné, preuves et faits à l'appui.
- Résumez les arguments de votre partenaire, en défendant ceux qui ont été contestés.
- Établissez la preuve de vos derniers arguments (les plus forts)
- Faites la synthèse de votre argumentation et réfutez à nouveau la proposition.
PREMIER ORATEUR AFFIRMATIF (le Premier ministre)
- Répétez la proposition.
- Si l'Opposition a contesté davantage les définitions, présentez des raisons supplémentaires pour faire accepter les vôtres.
- Réfutez l'argumentation de l'Opposition et reconstruisez celle du Gouvernement.
- Identifiez les arguments erronés de l'Opposition.
- Expliquez pourquoi l'argument est erroné, preuves et faits à l'appui.
- Résumez les arguments de votre équipe, en défendant ceux qui ont été contestés. (Vous ne devez pas apporter de nouveaux arguments.)
- Réaffirmez la proposition.
- Préparez vos fiches aide-mémoire, après avoir développé vos arguments. Ne réécrivez pas votre discours au complet; vous vous sentirez liés au texte et vous aurez tendance à le lire. Inscrivez plutôt des titres ou des formules en style télégraphique pour vous rappeler vos arguments principaux et l'ordre dans lequel vous voulez les présenter. Après une bonne recherche, c'est suffisant comme aide-mémoire. De plus, vous ne serez pas attaché à un texte, puisque votre discours ne sera pas écrit mot à mot. Si vous le voulez, écrivez vos citations et votre conclusion au complet sur des fiches séparées. Alors, attention de ne pas lire votre conclusion.
Ex. :
- Résolution
- Définitions (au complet)
- Arguments: A, B, C, D et E.
- Preuves A, B, C...
- Synthèse
- Conclusion (au complet)
- Répétez votre discours jusqu'à ce que vous l'ayez tellement bien en tête que vous ne vous servez de vos fiches qu'à l'occasion pour des données précises. Répétez ensuite devant votre partenaire qui pourrait offrir de bonnes suggestions. Souvenez-vous que vous faites équipe, que vous devez travailler ensemble et vous entraider.
Les deux équipes, face à l'auditoire, s'assoient à des tables de chaque côté du Président à l'avant de la classe. Le huissier (chronométreur) s'assoit face aux équipes à l'avant de la classe.
Le Président commencera le débat en lisant la résolution et en présentant les orateurs et le huissier. Il demandera parfois un sondage d'opinion de l'auditoire avant et après le débat. Alors, le nombre de personnes qui changent d'opinion à la fin du débat indique de façon officieuse quelle équipe a remporté le débat.
Commencez votre discours en vous adressant au Président: Monsieur le Président ou Madame la Présidente selon le cas. Durant le débat, ne référez pas aux autres participants par leur nom. Dites plutôt le Gouvernement ou l'Opposition, ou l'honorable Membre de l'opposition, le très honorable Premier ministre, mon collègue... L'argumentation porte sur la proposition devant la Chambre aujourd'hui. Tous les commentaires s'adressent au Président.
Présentez-vous avec assurance sans donner l'impression d'être snob. Soyez posé, aimable et courtois. Même dans la chaleur de l'argument, ne vous abaissez pas aux cris et aux sarcasmes. Soyez sincère, et devant la provocation qui vous soulève gardez votre sang-froid.
Lorsque vous parlez, levez-vous derrière votre pupitre ou un lutrin. Évitez de vous accoter sur votre pupitre et ne lisez pas vos notes. Parlez fort et clairement.
Après le débat, les orateurs se lèvent, se rencontrent au centre et donnent la main à leurs adversaires.
Si un adversaire commet une infraction aux règles du débat, on s'attend à ce que vous le remarquiez et que vous le signaliez. Par exemple, un adversaire ne s'adresse pas au Président au début de son discours ou vous interpelle directement plutôt que de parler à la troisième personne en employant votre titre.
Dès qu'il y a infraction aux règles, levez-vous en disant: Point d'ordre, M. le Président / Mme la Présidente. Le Président demandera à l'orateur de s'asseoir et vous demandera de vous expliquer. Vous précisez alors aussi brièvement que possible quelle infraction a été commise. Par exemple: L'honorable membre ne s'est pas adressé au Président. Puis vous vous assoyez. Votre adversaire ne peut répliquer. Le Président décidera s'il y a infraction aux règles ou non en disant: Le point d'ordre est justifié ou L'objection n'est pas fondée. L'orateur s'excusera devant la Chambre s'il est coupable et reprendra son discours.
Questions de privilège (Début)
Si votre adversaire vous cite mal ou diffame votre caractère, vous devez vous lever et vous défendre.
Dès que l'incident se produit, levez-vous et dites: Question de privilège, M. le Président/ Mme la Présidente. Le Président demandera à l'orateur interrompu de s'asseoir et vous demandera de vous expliquer. Vous présentez votre plainte le plus brièvement possible: M. Le Président/ Mme la Présidente, je n'ai pas dit... mais plutôt... Et vous vous assoyez. Votre adversaire ne peut répliquer. Le Président décidera si la question de privilège est justifiée ou non et l'orateur interrompu s'excusera auprès de la Chambre si nécessaire avant de poursuivre son discours.
Souvenez-vous des deux point suivants au sujet des questions de privilège. Votre adversaire peut résumer vos remarques ou les interpréter à sa façon: vous ne pouvez pas soulever une question de privilège à moins qu'il prétende vous citer. De plus, la plainte est d'ordre personnel: vous ne pouvez pas vous lever pour défendre votre partenaire, mais seulement pour vous défendre vous-même.
Dans certaines juridictions, on permet aussi les points d'information. En Ontario, par contre, le point d'ordre et la question de privilège sont les deux seules interruptions formelles permises lors d'un débat parlementaire. Par contre, vous perdrez des points si vous interrompez le débat pour des raisons insignifiantes. Utilisez ces interruptions modérément.
Pour juger adéquatement lors des interruptions, le Président doit suivre attentivement le débat en tout temps.
Un bon chahut est un mot d'esprit que l'on fait tout en demeurant assis. Il doit ajouter de l'humour au débat ou souligner une faiblesse dans les faits ou l'argumentation des adversaires. Ne chahutez jamais à moins d'être certain d'atteindre un de ces buts.
Un chahut doit être bref et comique. Il doit être aussi rare, sinon vous perdrez la sympathie de l'auditoire.
La façon la plus efficace d'éviter le chahut, c'est de le contrecarrer. Le chahuteur attend une pause dans le discours pour faire son commentaire; s'il n'y a pas de pause, il ne peut pas chahuter. Il cherche aussi l'occasion appropriée pour faire son commentaire; si le débat est très sérieux, les interruptions informelles n'atteindront pas leur but. Alors, si la Chambre commence à se dissiper, accélerez votre débit, élevez un peu le ton, et soyez plus sérieux.
À moins d'avoir une réplique beaucoup plus drôle que le chahut lui-même, ignorez-le. Il perdra plus facilement son impact, si on l'ignore. Cependant, si vous pouvez répliquer du tic au tac, faites-le. Par exemple: (chahut) La semaine prochaine, j'enseignerai à notre honorable orateur comment lire! (réplique) Cela donne peu de temps à l'honorable adversaire pour apprendre lui-même! Si vous répliquez, attendez que l'auditoire cesse de rire du chahut pour qu'il entende bien la réplique. Et devancez tout nouveau chahut en reprenant rapidement votre discours dès que le deuxième rire diminue.
Si le chahut a soulevé un point sérieux, et si vous avez le temps, répondez immédiatement à moins que cela nuise à l'argument que vous présentiez à ce moment-là. Souvenez-vous que votre objectif est de gagner le débat et non de contrer le chahut.
Derniers conseils sur le débat (Début)
- Rappelez-vous que 25 % de la réussite ou de la faillite d'un débat dépend de la chance, bonne ou mauvaise.
- Gardez le sens de l'humour. Ça ne vaut pas la peine de gagner si l'on fait fi des relations humaines.Il faut gagner avec modestie et perdre avec philosophie. Quelque chose devient injuste seulement si on s'abaisse à critiquer.
- En préparant votre débat :
a) partagez vos ressources;
b) soyez honnête dans vos citations et dans l'usage de vos sources;
c) apprenez les règles du débat pour éviter les malentendus et pour vous améliorer.- Une fois que le débat est commencé :
a) présentez-vous à vos adversaires;
b) soyez courtois en tout temps;
c) attaquez les arguments, non les orateurs.
Ne dites pas : Nos adversaires sont stupides de croire que leurs prétentions vont convaincre quelqu'un, mais plutôt: Les prétentions de nos adversaires présentent des lacunes assez graves que leur cas ne tient pas debout;
d) n'employez jamais ce qu'en langage militaire on appelle de « l'insolence stupide » : ricanements, clins d'oeil, mimes exagérés d'incrédulité ou de stupéfaction, rires, sourires condescendants. Ne rabaissez jamais votre adversaire.- Soyez ferme dans vos arguments mais soyez flexible dans votre façon d'aborder les arguments de votre adversaire.
- Gardez un sens d'humour, mais souvenez-vous qu'il s'agit de gagner le débat, non d'amuser la Chambre.
- Évitez la colère, mais ne craignez pas d'affronter votre adversaire avec force et vigueur; gardez votre sang-froid.
- Profitez des occasions de chahuter.
- Poursuivez votre discours sans vous laisser intimider par le chahut.
- Prenez des notes pendant les discours de vos deux adversaires pour aider votre partenaire et développer votre habileté d'écoute.
Judith Wyatt, 1980
Révisé par Jocelyne Tessier en 1997
Remerciements à Colin Castle pour les Derniers conseils